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LE DERNIER SOIR

remplir son devoir, son devoir le plus sacré envers la morte. Peut-être, qui sait… l’en bénirait-elle.

Oh la jolie fête que ce matin… C’était effaré et joyeux. Des gondoles passaient avec leur profil annelé de libellules, avec le geste incliné du gondolier, si lascif, si charmeur. Allait-on l’enterrer un jour pareil ? L’idée funèbre hantait Jacques. Ninette lui apparut sous son suaire, assujettie déjà, malgré sa beauté, sa jeunesse, son innocence, aux décompositions livides du cadavre. Tandis que Liéven songeait à ces choses, des rumeurs de forge comme d’habitude venaient de l’arsenal voisin. Là, d’où autrefois s’équipaient les galères de la Sérénissime, on rivait les coques, les puissantes cuirasses, les armatures des flottes de l’Italie nouvelle. Et ce bruit sec et sonore ressemblait à une mise au cercueil.

Après avoir pris son repas avec la résignation d’un enfant qui a de la peine, une grande