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LE LIVRE DE GOHA LE SIMPLE

si bien qu’après d’innombrables découvertes, il arrive à la connaissance de Dieu…

— Ô Nabi ! dit Alyçum, me permettez-vous d’emporter ce roman ?

— Je t’y engage fortement, répliqua El-Zaki. L’exemplaire est très imparfait. Il est plein d’erreurs, surtout quant aux points diacritiques, mais tu seras content de ta lecture. Quand tu l’auras terminé, je te prêterai des ouvrages historiques que tu dois connaître : La Conquête des Pays de Béladori par exemple, ou bien Les Chroniques de Saladin de Béha-el-Din ou encore Les Prairies d’Or du prodigieux Maçoudi…

Goha d’un œil amusé suivait un sphinx qui traçait autour d’une lampe des cercles vertigineux. Il frôlait le verre brûlant, hésitait, reprenait son vol. Soudain, il se précipita dans la flamme et retomba les ailes repliées.

— Pauvre bête, de quelle étrange passion as-tu été victime ? murmura le maître.

De ses doigts prudents, il saisit l’insecte meurtri :

— S’il parlait que dirait-il ?

— Il dirait : « Je souffre », répondit Alyçum.

– Non, c’est de la colère qu’il exprimerait plutôt que de la souffrance… Cette lampe pour lui porte un nom : « Le destin ». Sa folie, il la nomme : « Le malheur ».

— Mais il ne parle pas, remarqua Goha.

Il avait l’art de dénouer les plus angoissants problèmes par des épilogues rapides et ses savants