Page:Ades - Josipovici - Mirbeau - Le Livre de Goha le Simple.djvu/375

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Devant lui, le soleil se ruait dans les ravines, fouillait les collines de décombres, flamboyait à la pointe des rocs. Le désert pétillait par ses innombrables quartz et ses calcaires. Des rubis en cascades s’écroulaient le long des pentes, de l’or en fusion bouillonnait dans les enfoncements… Il se jeta à la poursuite de ces trésors fabuleux, saisit à pleines mains les ors et les pierreries… Mais autour de lui les richesses se multipliaient. Il enleva son caftan qu’il remplit aussitôt. Un à un ses vêtements tombèrent. Enfin nu, il amassa sa fortune en tas…

— C’est du sable et de la pierre, fit-il d’une voix douce et un sourire erra sur son visage. Car pendant tout le temps qu’il avait ramassé les trésors imaginaires quelqu’un disait en lui : « Qu’est-ce que tu fais ? Ce n’est que du sable et de la pierre… » Et il avait continué quand même pour jouer, avec son illusion.

— Des cailles… des cailles… des cailles…

Il vit passer, dalmatique au vent, un bédouin monté sur un chameau rapide comme une flèche et le museau pendant jusqu’à terre. Des scarabées aux reflets métalliques voyageaient à travers les sinuosités du sol, des papillons voltigeaient et des mouches bourdonnaient.

Au minaret d’Amrou, le muezzin chantait et sa voix parvenait affaiblie comme une lamentation. C’était l’heure de la prière ; Goha se mit à prier.

— Au nom du Dieu clément et miséricordieux, un plat de cailles pour Goha… Je n’ai rien mangé depuis ma naissance… Tu n’as qu’à sentir