Page:Ades - Josipovici - Mirbeau - Le Livre de Goha le Simple.djvu/376

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mon haleine… Louange à Dieu, maître de l’Univers…

La voix du muezzin s’allie aux tonalités du crépuscule. Du haut du minaret, elle s’élance sur les étendues, cherchant dans le désert les rares fidèles qui s’y trouvent dispersés.

— Venez au salut ! venez à la prière ! Dieu est grand.

Goha poursuit :

— L’haleine du jeûneur est un parfum exquis pour Dieu… et un bon plat rempli jusqu’au bord est aussi une bonne chose…

— Dieu est grand ! Dieu est grand !

Les paroles sacrées se prolongent infiniment et le muezzin s’arrête pour écouter cette musique céleste dont les premières notes sont nées en lui. Du nord, du sud, de l’ouest partent des appels semblables… Goha, la tête bourdonnante, poursuit sa prière :

— Non, je ne suis pas content, Nabi, Goha n’est pas content… Souverain au jour de la rétribution c’est toi que nous adorons, c’est toi dont nous implorons le secours !…

La voix du muezzin s’est tue. Goha s’est tu et regarde El Kaïra où des lanternes brillent. Il y a là-bas une chambre aux tapis moelleux, aux divans profonds. Et dans cette chambre, il y a un vieillard hospitalier et tendre : Cheik-el-Zaki. Goha se lève et, sans se rendre compte qu’il est nu, se dirige vers la ville.