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Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 1.djvu/574

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DOGME

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Bihliothek âer Symbole, in-8°, Breslau, 189’j, Appendice de A. Harxack. p. 364 sq., considérées comme un dépôt et comme le fondement du salut ? Cf. art. Tradition. Le fait est d’autant plus inexpliqué, si Jésus n’a pas inauguré un enseignement intellectuel comme il a inauguré un mouvement moral, qu’aucune secte religieuse de cette époque n’a senti le besoin d’un corps de doctrine arrêté, qu’aucune école philosophique n’exerce alors sur tant de points du monde romain une influence ainsi caractérisée, et que les philosophes chrétiens de cette première heure A’ont philosopher non pour introduire ces formules, mais pour essayer de les justifier. S. Justin, / Apol., 60, P. G., t. VI, col. 420.

2° L’histoire de S. Paul est la meilleure réponse aux innovations qu’on lui prête. Qu’il ait mieux compris et fait mieux comprendre la richesse des dogmes reçus, nul ne le conteste ; qu’il ait proprement créé la dogmatique chrétienne et fait délier la piété chrétienne Aers la spéculation, quelle critique consciencieuse pourra l’établir ? Voici les faits.

Son caractère ne l’y prédispose pas : c’est le docteur de la charité et de la liberté dans le Christ, / Cor., II, 15 ; // Cor., iii, 17, non l’apôtre du savoir.

Sa manière d’agir est signilicatiA e. En proposant ses vues profondes, il se réclame de l’enseignement commun, / ror., xv. i, 3, 11. C’est habile, s’il innove, mais dangereux, s’il veut réussir, car il est le dernier venu et n’a que trop d’ennemis prompts à lui opposer les « grands apôtres ». On les lui oppose en eflet, mais uniquement sur le terrain disciplinaire et moral.

Il tient à afTirmer son union avec les Douze et à autoriser « son Evangile » de l’approbation complète que Jacques, Pierre et Jean lui ont donnée. Gal., i, 23 ; II, 2-1 1 ; cf. II Petr., iii, 16.

Ce noA’ateur s’adresse à des églises qu’il n’a pas fondées et leur prêche ses idées, sans éprouver le besoin d’excuser ces innovations, en prédicateur qui reprend un thème connu et l’explicpie seulement plus à fond, Ad Rom., xvi, l’j.

Ces lettres, loin de reljuter par leur nouveauté, ou par l’articulation d’un dogmatisme inconnu aux premiers disciples, ont tel succès, qu’elles sont recherchées même par les églises auxquelles elles ne sont pas adressées et que leur ferveur devait défendre contre ces déviations.

Enfin, cet apôtre de l’Esprit et de la liberté est celui qui donne pour pierre de touche de l’inspiration authentique l’attachement à la tradition, / Cor., xji, 3 ; XIV, 37, 38 ; Ephes., iv, 3-^ ; Gal., i, 8, 9, et qui distingue avec soin son enseignement personnel de celui qui Aient de Jésus : / Cor., iii, 1 1 ; vii, io-13, 25 ; XI, 23, XV, 3 ; H Cor., v, 20 ; Gal., i, n ; 11, 2 ; / Tim., VI, 20 ; // Tim., i, 14 ; iv, 7.

S° Les évangiles synoptiques marquent un stade moins aA’ancé de la pensée chrétienne : c’est une histoire anecdotique, une catéchèse rudimentaire. Ils paraissent après les épîtres pauliniennes. Or ils sont, malgré tout, reçus avec elles et au même titre : lïi difl’érence de forme et, jusqu’à un certain degré, de contenu, qui devait mettre en garde, n’a pas permis de méconnaître l’identité foncière de la doctrine.

Il existe en efl"et, dans les Synoptiques, bien qu’enveloppé dans des récits et caché dans des faits, un enseignement précis, dont l’accord a^ec celui de S. Paul se découvre sans grande peine. C’est d’abord le fonds dogmatique de l’A.-T., qui forme la trame du Nouveau : personnalité de Dieu, création, providence, rémunération, salut messianique. C’est ensuite l’histoire de la naissance, de la Aie, de la mort et de la résurrection du Christ. Ce sont encore des assertions nettes sur le Messie lui-même, définissant sa nature.

J/flf., XI, 2- ; Luc, X, 22 ; Mat., xa’i, I’J ; et ses pouvoirs, Mat., IX, 6 ; Marc, 11, 10 ; Luc, v, 24 ; Mat., xxaiii, 18, I g… Jésus ne s’y présente pas comme simple transmetteur de la foi ; il est lui-même objet de croyance.

Est-ce bien là une page blanche ?

Si l’on objecte les difl"érences marquées qui séparent les Synoptiques, S. Paul, S. Jean, les Pères apostoliques, il sera facile de montrer qu’elles n’indiquent pas une altération, une déAiation du courant primitif, mais une description plus complète et une prise de conscience progressivc du contenu intellectuel des faits chrétiens. Cf. J. Lebreton, Origines du dogme de la Trininé, t. I, c. v, p. 3^4 sq. ; Aoir XIV, col. 116 1 sq.

C’est à nos advcrsaires de prouvcr ce double postulat de leur thèse : qu’un auteur ne peut parler sur un sujet, sans être tenu de tout dire, ou qu’un fait transcendant, comme l’Incarnation du Verbe, peut être exprimé en une esquisse unique, et qu’on estcon-A’aincu d’erreur ou de duplicité, dès qu’on prétend en traduire quelque détail avcc plus de précision.

V. Trois classes de dogmes- — D’après la nature des A’érités garanties par l’autorité diA-ine.’nous pouvons distinguer trois catégories de dogmes :

a) Les vérités d’ordre naturel. — En droit au moins, elles ne dépassent pas les limites de la raison humaine : telle l’existence de Dieu, de la loi morale, de la Aie future…

/3) Les mystères proprement dits. — Inaccessibles aux forces de la raison, qui ne peut ni les découvrir à elle seule, ni les prouvcr directement, même après leiu’réAélation, ils ne tombent sous son contrôle que par la critique des titres du témoin divin qui nous les a enseignés : Trinité, péché originel, adoption diA’ine, etc.

/) Les faits historiques enseignés par la Bible ou par la Tradition, et spécialement ceux qui concernent la personne du Sauveur. — Ils relè-A’ent de la connaissance sensible et du témoignage historique, quant au matériel de l’éA’énement, et des inductions de la raison, quant à leur qualification de faits diA’ins : naissance, vie, mort et résurrection du Christ…

Manifestement les diflicultés que présente chaque classe, à l’adhésion de l’esprit, sont très différentes : l’attaque comme la défense se doivent d’en tenir compte.

VI. Valeur de vérité. — AA-ant de définir quels rapports le dogme peut avoir soit à la spéculation, soit à l’action, nous noterons aA^ec profit trois degrés dans la connaissance religieuse.

a) Connaissance catéchétique : c’est celle du catéchumène dans l’esprit duquel, tant bien que mal, le catéchiste a A’ersé son propre savoir. Il peut avoir compris quelque chose aux termes bonté divine, providence et autres, comme l’enfant des écoles entrevoit au moins quelque chose, quand on lui explique bien représentation nationale, finesse diplomatique, etc. C’est à peine une connaissance personnelle.

/3) Connaissance pratique : c’est celle de qui connaît par sa propre expérience, de qui comprend par exemple la miséricorde et la « philanthropie » du Christ, pour en avoir épromé les efl’ets.

/) Connaissance dialectique : c’est celle du saA-ant et du philosophe.

La première est juste un peu plus que verbale, la seconde est expérimentale, la troisième toute abstraite. On peut aA’oir la première et la troisième sans la seconde et la seconde sans la troisième ni la première. Dans les trois cas, pourtant, on sait quelque chose.