Page:Agnel, Émile - Curiosités judiciaires et historiques du moyen âge - Procès contre les animaux.djvu/43

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quête contre les fourmis, et comme elle fut contestée par la partie de ces dernières, il articula que les demandeurs, se conformant aux statuts de leur ordre mendiant, vivaient d’aumônes qu’ils recueillaient à grand’peine dans les habitations de ce pays, et que les fourmis, animal dont l’esprit est totalement contraire à l’Évangile, et qui était abhorré par cette raison de saint François, leur père, ne faisaient que les voler, et non-seulement procédaient en larrons fourmiliers, mais encore que par des actes de violence manifeste, elles prétendaient les expulser de leur maison et la ruiner ; et que par conséquent elles étaient tenues de donner leurs motifs, et sinon, il concluait qu’elles devaient toutes mourir de quelque peste ou être noyées par quelque inondation, ou tout au moins être pour toujours exterminées dans ce district.

« Le procureur du petit peuple noir, répliquant à ces conclusions, allégua avec justice pour ses clients, en premier lieu : qu’ayant reçu du Créateur le bienfait de la vie, elles avaient le droit naturel de la conserver par les moyens que le Seigneur lui-même leur avait enseignés. — Item, que dans la pratique et l’exécution de ces moyens, elles servaient le Créateur en donnant aux hommes l’exemple des vertus qu’il leur a ordonnées, savoir, de la prudence en pensant à l’avenir et en économisant pour les temps de misère : Formicœ populus infirmus, qui prœparat in messe cibum sibi[1] ; de la diligence, en amassant en cette vie des mérites pour la vie future selon saint Jérôme ; Formica dicitur stre-

  1. Prov. xxx, 25.