Page:Agoult - Histoire des commencements de la république des Pays-Bas - 1581-1625.djvu/121

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entièrement bouché l’issue. Un grand nombre de soldats s’élancent du haut des remparts dans les fossés, s’efforçant de gagner l’autre bord à la nage, mais on tire sur eux, et ils disparaissent sous une pluie de balles.

Telle fut l’issue de « cette malheureuse et déloyale action d’Anvers[1] », de ce honteux coup d’État, échoué misérablement devant la simple fermeté d’un peuple accoutumé à se respecter lui-même en respectant le droit. Les Français ne perdirent pas moins de quinze cents hommes, dont deux cent soixante gentilshommes des meilleures maisons de France, entre autres le fils du maréchal Biron, MM. de Saint-Aignan et l’évêque de Coutances, grand aumônier du duc. Guillaume de Fervaques, le principal auteur de l’entreprise, resta prisonnier. Il faut dire à l’honneur du peuple d’Anvers qu’il ne montra pas moins d’humanité en cette occasion qu’il n’y avait fait paraître de courage. Aussitôt le feu cessé, il s’empressa au secours de ses indignes agresseurs. On chercha dans les entassements de cadavres, on releva tous ceux qui respiraient encore, on les porta dans les maisons, on pansa leurs plaies ; ils furent soignés avec sollicitude ; beaucoup guérirent et furent relâchés sans rançon ; ceux qui ne revinrent pas à la vie reçurent une sépulture honorable : grande leçon pour cette « ingrate et incorrigible légèreté française » ; générosité humiliante pour cette nation « qui acquérait de plus en

  1. Sully, Mémoires, chap. xvii.