l’homme qui va avec une autre femme que la sienne.
— Et pourquoi cela ? se récria-t-elle. Ce sont les hommes qui arrangent ainsi les choses.
— C’est la nature, dit Maurin.
Il parut réfléchir, puis il expliqua :
— J’y ai songé, des fois, pour moi-même, et voici, Tonia, comme je me l’explique. Il est bon que je te le dise, car si tu dois être ma femme, nous nous serons entendus à ce sujet par avance. C’est une chose d’importance, la première de toutes. Écoute donc bien. Je me suis pensé, des fois, que l’homme est un champ de vigne où il y a beaucoup de grappes. Si l’on en prend une on ne gâte pas les autres ; on ne te gâte ni ta terre, ni ta vigne, ni rien. On ne te fait tort que d’une grappe ; et encore, si tu n’en sais rien, tu n’as aucune peine et le dommage, à la vérité, n’est pas grand.
— Pour la femme, c’est la même chose !
— Oh ! que non pas !
— Comment donc ?
— La femme n’est pas une vigne, c’est un cellier qui doit rester bien fermé contre les voleurs, car ce qu’il y a à craindre, ici, ça n’est pas qu’on emporte le vin, c’est que dans mon cellier on en apporte au contraire de mauvaise qualité ou qui, mêlé au mien, lui ôtera sa belle franchise.
« Un mari, à mon idée, ne peut compromettre qu’une grappe de raisin, s’il est infidèle ; tandis que la femme, si elle n’est pas sage, compromet la récolte entière, et tous les bavards du monde ne changeront rien à cela. Un seul jour peut faire un même homme père plusieurs fois ; il faut trois quarts d’année pour faire une mère.