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L’ILLUSTRE MAURIN

rien dit de tout cela, fit malicieusement M. de Siblas.

— Il n’en parlera pas souvent, je crois, répliqua Maurin.

Et comme il se retirait, il revint brusquement sur ses pas :

— Alors ?… vous y tenez beaucoup, à avoir un roi ?… Quel malheur !… vous me plairiez tant sans ça ! dit-il au comte charmé de sa familière candeur.

— Mon Dieu ! déclara M. de Siblas, je me passerais encore de roi si tous les citoyens en étaient dignes.

— Dignes de quoi ?

— Dignes qu’on s’en passât, c’est-à-dire dignes de la liberté. Un peuple digne de la liberté, monsieur Maurin, c’est un peuple honnête et intelligent. Or, beaucoup d’intelligences et d’honnêtetés, ce n’est pas facile à trouver ; il serait plus aisé de trouver un bon roi ; il est plus difficile en un mot de trouver vingt millions d’honnêtetés et d’intelligences, qu’une seule intelligence et qu’une seule honnêteté.

— Bon, dit Maurin, qui réfléchissait ; il ne faut qu’une bonne loi.

— Qui la fera ? répliqua vivement M. de Siblas, si vous ne savez pas choisir vos législateurs ? Hélas ! ce qui manque, ce sont de bonnes mœurs, de l’honnêteté, des caractères.

— Nous avons des enfants, dit Maurin devenu grave.

Le comte soupira ; puis, après un silence :

— Vous pouvez être sûr que je ne retirerai pas ma candidature.

Il tendit la main à Maurin.

— À propos, monsieur le comte, dit Maurin, depuis que je ne vous ai vu, il s’est passé des événements qui