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L’ILLUSTRE MAURIN

— Pas encore ! dit le mousquetaire. Il ne devait rugir, à son habitude, qu’au soleil tombant, et j’étais venu en avance, pour ne pas l’épouvanter.

— Bon ! dit Saulnier. Tu comptais donc que ce serait lui qui aurait peur ? tu étais donc quillé (perché) sur un arbre ?

— Jamais de la vie ! s’écria Maurin ; monter sur un arbre, c’est bon pour tuer le lapin à Sainte-Maxime, mais un lion, c’est assez visible quand ça déboule et une touffe de mussugue ne suffit pas à le cacher.

— Ah ! ça déboule tout bonnement d’une touffe, comme un lapin ? fit Saulnier inquiet.

— D’une touffe de kermès par exemple, et comme un lapin, tu l’as dit… Tu te promènes… tu lances un de tes massacans (cailloux) dans un buisson… crac ! un lion te sort ! mais n’aie pas peur, parce que, souventes fois, si c’est en plein jour, il s’éloigne mazestueusement — à condition qu’il ait déjeuné… ou qu’il n’ait pas de petits… Et plus souvent encore tu peux jeter ton caillou dans les buissons, il ne te sortira rien !

— Allons, voyons, dit Saulnier, tu me fais languir… Tu n’étais pas sur un arbre, mais assis comme à présent ?

— Juste ! j’étais assis sur un rocher, mon fusil entre les jambes, avec, devant moi, ma chèvre attachée et ma source.

— Je tremble ! dit Saulnier.

Maurin reprit :

— Il arriva tout à coup…,

— Noum dé pas disqui, fit Saulnier, il arriva d’un bond ? sans avoir gueulé pour te prévenir ?