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L’ILLUSTRE MAURIN

Le malicieux Maurin n’avait pas perdu un mot de cette conversation.

— Ma foi de Dieu ! fit-il, c’est vraiment vrai que j’ai pris ces deux melons sans croire les voler. La terre me les offrait, le soleil aussi…… Je me suis pensé comme ça qu’au dessert ils feraient plaisir à tout le monde ; qu’un sanglier cette nuit aurait bien pu les ronger jusqu’à l’os, pechère !… Et puis en fin de compte j’aurais dû ne pas vous dire comment je me les suis procurés, et vous en auriez mangé sans remords… Allons, à table, messiès !… J’ai bougrement faim, dit-il pour terminer ; le bain ouvre l’appétit.

— Vous vous êtes baigné, Maurin ? questionna M. Labarterie sans attacher d’importance à sa question.

— Je suis même encore en nage ! répondit Maurin, équivoque.

Il se leva, emportant les melons pour les mettre à rafraîchir dans le puits.

Quand il revint, on avait attaqué les vivres étalés sur les serviettes blanches :

— Bougre de bougre ! que vous me feriez dire, — si j’étais resté encore trois minutes absent, vous ne m’auriez rien laissé !

— Regardez donc votre assiette, dit Labarterie, ma femme a pris soin de vous.

— Madame, dit Maurin, je ne sais plus comment vous dire mon gramaci !

Et quand l’excitation d’un déjeuner solide, arrosé de vins actifs, eut animé les conversations et les rires :

— Vous ne savez pas, monsieur le juge ? dit gaîment Cabissol, Maurin vous a qualifié ce matin d’homme dangereux.