Page:Aicard - L’Illustre Maurin, 1908.djvu/427

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
409
L’ILLUSTRE MAURIN

Un ronflement continu, énorme, en mineur comme celui des cataractes du ciel ouvertes pour un déluge et laissant tomber l’océan d’en haut sur l’océan d’en bas… Sur ce ronflement uniforme, terrible, un crépitement en majeur accompagnait de sonorités imitatrices les légèretés, les broderies, les caprices, les arabesques de l’étincelle qui dansait jaune et claire sur le manteau fasceyant des larges flammes écarlates.

Des choses consumées qui gardaient leur forme, des buissons debout qui avaient exhalé leur vie et qui semblaient vivre encore, des fantômes de hautes broussailles, tout à coup s’affaissaient en tas de cendres…

Et sur des monceaux de poussières ardentes, des cratères se formaient, des volcans s’ouvraient.

… Les Maures brûlent ! Les Maures brûlent !

Là-bas, sur la mer, au large, les barques de pêcheurs couraient sur une mer pourpre, sur des fonds incendiés, dans un resplendissement de reflets humides.

En de certains endroits du champ de désastre, s’élevaient des flammes larges, longues, droites, comme tranquilles, dès que tombait la brise. Ces puissantes colonnes de feu dépassaient de beaucoup la hauteur des plus grands arbres… Subitement un courant d’air les rabattait. Le haut rideau s’inclinait, se couchant au devant de lui-même. À peine étalées contre terre, les flammes s’allongeaient encore et rampaient sur le sol, comme sournoises. On les apercevait sous le réseau des broussailles, tels des monstres de rêve derrière des grilles — mais, jamais emprisonnées, elles se relevaient plus loin, sous bois, grimpantes, allumaient les branches qu’elles traversaient de bas en haut en sifflant, — et