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MAURIN DES MAURES

bruissement immense de la forêt, parmi quelques cris de geais et de pies, un son singulier, pareil à une plainte humaine.

Le fusil au poing, Maurin attendait il ne savait quoi.

Tout à coup un appel désespéré, un cri de femme éclata, aigu, sous bois, à quelque distance…

Alors, d’une voix de commandement qui retentit dans l’écho de la montagne rocheuse, Maurin cria son nom en provençal :

Móourin deïs Màouros !

Le nom célèbre de Maurin ainsi lancé à pleine voix en notes prolongées et immédiatement suivi d’un cri de chat-huant qui eût été inimitable pour tout autre, annonçait, quand il le jugeait bon, sa présence aux habitants de la contrée. Les petits enfants même des villages du Var connaissaient cette habitude de Maurin et essayaient de reproduire sa clameur dans leurs jeux.

Maurin appuya son cri d’un coup de feu, sachant bien que ce bruit effraie toujours un criminel en train de mal faire… Et il s’engageait sous bois dans la direction des plaintes qu’il avait entendues, lorsque la Corsoise, haletante, rouge, tout échauffée et indignée, vint se jeter contre lui.

Elle regardait Maurin avec de grands yeux ardents où il voyait l’animation de la course et en même temps la colère qu’elle ressentait contre ses agresseurs inconnus.

— En criant, vous m’avez sauvée ! dit-elle toute frémissante.

Et dans ses yeux la reconnaissance remplaçait la colère…

Ainsi, il tenait, là, dans ses bras, la fiancée du gen-