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Page:Aicard - Maurin des Maures, 1908.djvu/378

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MAURIN DES MAURES

boire à tous, et qu’on ne sache pas où est votre habitude. J’ai bien la maison de mon frère, où je vais quelquefois et qui est un brave frère, mais il ne parle pas et on ne sait jamais où je suis.

Il s’arrêta, regarda au loin les gendarmes qui disparaissaient derrière l’autre versant de la colline, soupira et reprit sa marche et son discours :

— Le jour de mon mariage, il y a vingt-cinq ans, — quelle sottise de se marier ! — moi aussi ils vinrent pour me prendre, les gendarmes, à cause d’une méchante amende que je n’avais pas payée. Ils vinrent le soir même de mon mariage. Celle-là, d’histoire, était un peu forte ! — Ils frappent à ma maison à la fin du jour. Ils ouvrent et ils me disent : « . C’est vous qu’on vous dit Pastouré ? — Oui. — Suivez-nous ! »

« Ma femme, mariée du matin, était couchée depuis une minute à peine. Aussi, je l’eus leste, la réponse ! et je leur dis seulement : « Demain matin de si bonne heure que vous voudrez, mais ce soir, c’est impossible. » Ils voulaient m’emmener quand même ; mais le maire, — c’était à Roquebrune — était intelligent et apprenant ce qu’ils voulaient faire, il vint et leur dit : « Laissez-le tranquille jusqu’à demain : il n’a pas été condamné à coucher seul la nuit de ses noces ! »

« Et c’est pourquoi naquit Pastouré, mon fils, Pastouré Firmin, qui depuis longtemps chasse et court la fille, le gueux !… Et ce même soir, au moment de me coucher avec ma femme — non ! quel rire quand j’y pense ! — je songeai tout à coup à un oubli que j’avais fait. — Voilà où vous mènent les femmes : à oublier vos plus importantes affaires ! Elle vit que je me rhabillais et elle me demanda : « Où vas-tu ? — Prenez le temps en patience,