Page:Aimard - Balle france, 1867.djvu/80

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Le Bison-Blanc lisait à la lueur d’une lampe.

— Hélas ! le pourrai-je ?

— Ah ! tu doutes ? s’écria le vieillard en frappant du poing sur la table et le regardant en face, alors tu es perdu ; renonce à tes projets, tu ne réussiras pas ; dans une route comme la tienne, hésiter c’est reculer, reculer c’est périr !

— Mon père !

— Silence ! s’écria-t-il avec un redoublement d’énergie, et écoute-moi : lorsque pour la première fois tu m’as dévoilé tes projets, j’ai essayé par tous les arguments possibles à te les faire abandonner ; je t’ai prouvé que ta résolution était prématurée, que les Indiens, abrutis par un long esclavage, n’étaient plus que l’ombre d’eux-mêmes, et qu’essayer de réveiller en eux tout sentiment noble et généreux était essayer de galvaniser un cadavre ; tu as résisté, tu n’as voulu rien entendre, tu t’es jeté tête baissée dans des intrigues et des complots de toutes sortes, est-ce vrai ?

— C’est vrai !

— Eh bien ! maintenant, il est trop tard pour reculer, il faut marcher en avant quand même ; tu tomberas, ceci est certain, mais au moins tu tomberas avec honneur, et ton nom, chéri de tous,