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Page:Aimard - La Fièvre d’or, 1860.djvu/171

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LA FIÈVRE D’OR.

déchiffrable dans lequel il lui était impossible de lire un mot.

La vie que le Français avait constamment menée dans le désert, toujours en lutte, soit avec les Indiens, soit avec les bêtes fauves, n’avait nullement été favorable pour le faire arriver à la connaissance du cœur féminin ; et puis l’amour profond de sa première jeunesse, amour dont le souvenir était toujours palpitant dans son cœur, l’avait empêché de songer à s’occuper de quelque façon que ce fût des autres femmes que le hasard avait parfois jetées sur sa route, et qui n’avaient jamais été pour lui que des créatures faibles, sans défense, que son devoir était de protéger.

Aussi, dans cette circonstance, le digne chasseur était fort empêché, et ne savait comment parvenir à deviner les intentions de la jeune fille ; il était évident pour lui que doña Angela avait un but caché qu’elle voulait atteindre, et que l’achat des novillos n’était qu’un prétexte pour se rapprocher de don Luis. Mais quel était ce but ? pourquoi voulait-elle voir son ami ? Voilà ce qu’il cherchait vainement sans pouvoir le découvrir.

Enfin, murmura-t-il en résumant le chaos de pensées qui se heurtaient dans son cerveau, peut-être vaut-il mieux que cela soit ainsi et qu’elle ne voie pas Louis : qui sait ce qui serait résulté de cette entrevue ? Le père de cette dame est gouverneur de la Sonora, tâchons surtout de ne pas nous brouiller avec lui : qui sait si nous n’aurons pas besoin de lui plus tard ? C’est singulier, je ne sais où j’ai entendu prononcer le nom de cet homme, mais il est évident que je ne l’entends pas aujourd’hui