autre difficulté, il fallait absolument plonger dans le fleuve, afin d’imprimer aux arbres la direction convenable et les faire dévier de façon à atteindre la colonie au lieu de suivre le courant, c’est-à-dire le milieu du fleuve. Il y avait encore un autre inconvénient qui n’était pas le moins grave de tous, c’est que les arbres sur lesquels se trouvaient les Apaches en rencontraient d’autres sur leur route, avec lesquels ils choquaient, ou bien leurs branches respectives s’enchevêtraient si bien les unes dans les autres qu’il devenait positivement impossible de les séparer et qu’il fallait bon gré mal gré les entraîner avec soi ; si bien qu’au bout d’une demi-heure à peine, on aurait cru voir sur le fleuve naviguer un immense radeau qui en tenait toute la largeur.
Les Indiens sont tenaces ; quand ils ont entrepris une expédition ils n’y renoncent que lorsqu’il leur est irrévocablement prouvé que la réussite est impossible ; sans cela ils résistent quand même. Ce fut ce qui arriva dans cette circonstance : plusieurs hommes furent noyés, d’autres blessés si grièvement qu’ils furent contraints, malgré eux, de regagner le rivage. Cependant les autres tinrent bon, et, encouragés par leur chef, qui ne cessait de leur faire entendre sa voix, ils continuèrent à descendre le fleuve.
Déjà, depuis longtemps, l’île d’où ils étaient partis avait disparu au loin derrière eux dans les méandres formés par le cours irrégulier du fleuve, la pointe sur laquelle s’élevaient les bâtiments de la colonie apparaissait à peu de distance, la noire silhouette de l’hacienda se découpait capricieusement sur l’azur du ciel, à une portée de flèche environ de