Page:Aimard - La Loi de Lynch, 1859.djvu/148

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aux deux femmes devenir s’asseoir à ses côtés, auprès du feu allumé pour éloigner les bêtes fauves.

Le père Séraphin connaissait un peu Ellen, il se rappelait avoir souvent rencontré la jeune fille, et même avoir causé avec elle dans la forêt, à l’époque où son père s’était si audacieusement installé sur les propriétés de don Miguel Zarate.

Le caractère d’Ellen lui avait plu ; il avait trouvé en elle tant de simplicité de cœur et de loyauté native, que souvent il s’était demandé comment une aussi charmante créature pouvait être la fille d’un scélérat si endurci que le Cèdre-Rouge, cela lui semblait d’autant plus incompatible, qu’il avait fallu à la pauvre enfant un grand fonds d’honnêteté dans le cœur pour résister à l’entraînement des mauvais exemples qu’elle avait incessamment sous les yeux.

Aussi il s’était vivement intéressé à elle et lui avait prodigué des marques d’intérêt en l’engageant à persévérer dans ses bons sentiments. Il lui avait laissé entrevoir qu’un jour Dieu la récompenserait en l’enlevant du milieu pervers dans lequel le sort l’avait jetée, pour la faire rentrer dans la grande famille humaine qu’elle ignorait.

Lorsque les deux femmes furent assises à ses côtés, le missionnaire leur fit, de sa voix douce, sympathique et pleine d’onction, une paternelle admonestation pour les engager à supporter avec patience et résignation les tribulations que le Ciel leur envoyait ; puis il pria Ellen de lui raconter en détail tout ce qui s’était passé dans la prairie depuis son départ pour la France.

Le récit de la jeune fille fut long et triste, souvent interrompu par ses larmes qu’elle ne pouvait contenir.