Page:Aimard - La Loi de Lynch, 1859.djvu/252

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chose facile que de se diriger au milieu de ce chaos inextricable de rochers dont les têtes chenues pointaient çà et là au-dessus d’abîmes incommensurables, au fond desquels on entendait vaguement murmurer une eau invisible.

Un faux pas était mortel.

Cependant Valentin s’avançait avec autant d’assurance que s’il se fut trouvé voyageant par un éblouissant soleil dans la plus belle sente de la prairie, tournant à droite, revenant à gauche, gravissant un rocher ou se laissant glisser le long d’une pente presque perpendiculaire sans hésiter jamais, sans se retourner vers ses compagnons, auxquels seulement il disait parfois à voix basse ce seul mot :

— Courage !

Il fallait que ces cinq hommes fussent doués d’un cœur de bronze pour ne pas donner de marques de faiblesse pendant cette rude course dans des régions où l’aigle lui-même ne s’élevait qu’en hésitant.

Ils marchèrent ainsi deux heures, sans qu’un mot fût échangé entre eux.

Après une descente assez longue, pendant laquelle ils avaient vingt fois couru le risque de rouler au fond des précipices, Valentin fit signe à ses compagnons de s’arrêter.

Ils jetèrent alors un regard anxieux autour d’eux.

Ils se trouvaient, pour ainsi dire, en équilibre sur une plate-forme de dix mètres carrés.

Autour de cette plate-forme tout était ombre.

Elle dominait un abîme d’une profondeur incommensurable.

La montagne, tranchée comme par l’épée de Roland, était séparée en deux parties, au milieu des-