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Page:Aimard - La Loi de Lynch, 1859.djvu/259

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membres, sa parole était saccadée, sa voix sourde.

— Bah ! fit Valentin en essayant de sourire, ce n’est rien, un peu de volonté et vous vous rendrez maître de cette terreur qui n’est pas autre chose que le vertige.

— Je ne sais ce que c’est, je ne pourrais le dire ; seulement je vous certifie que tout ce qu’il est moralement possible de faire, je l’ai fait pour me rendre maître de ce sentiment qui me domine et me maîtrise.

— Eh bien ?

— Tout a été inutile ; bien plus, je crois que ma terreur augmente en proportion de mes efforts pour la vaincre.

— Comment ! vous qui êtes si brave !

— Mon ami, répondit le général en souriant tristement, le courage est une affaire de nerfs ; il n’est pas plus possible à un homme d’être constamment brave qu’à un autre d’être constamment lâche ; il y a des jours où plus que d’autres la matière domine l’intelligence, le physique prend le dessus sur le moral ; ces jours-là, l’homme le plus intrépide a peur : je suis dans un de ces jours-là, voilà tout.

— Voyons, mon ami, reprit Valentin, réfléchissez un peu, que diable ! Vous ne pouvez rester ici ; retourner en arrière est impossible ; faites de nécessité vertu.

— Tout ce que vous me dites, interrompit le général, je me le suis dit ; et, je vous le répète, plutôt que de m’aventurer sur cette corde, je me brûlerai la cervelle.

— Mais c’est de la folie cela ! s’écria le chasseur ; cela n’a pas le sens commun.