Page:Aimard - La Loi de Lynch, 1859.djvu/263

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Cependant Valentin éprouvait pour le général une profonde amitié ; en maintes circonstances il avait été à même d’apprécier ce qu’il y avait de réellement noble et de réellement grand dans son caractère : aussi la catastrophe terrible qui, tout à coup, sans préparation aucune, avait rompu tous les liens qui les attachaient l’un à l’autre, lui avait-elle causé une grande impression.

— Allons, allons, dit-il en secouant la tête comme pour en chasser les idées tristes qui le bourrelaient, cosa que no tiene remedio olvidarla e lo mejor[1]. Notre ami nous a quittés pour un monde meilleur, peut-être vaut-il mieux qu’il en soit ainsi ; Dieu fait bien ce qu’il fait ; nos regrets ne rendront pas la vie à notre cher général ; songeons à nous, mes amis, nous ne sommes pas sur des roses non plus, et si nous ne nous hâtons pas, nous courrons risque de l’aller bientôt rejoindre. Voyons, soyons hommes.

Don Miguel Zarate le considéra d’un air triste.

— C’est juste, dit-il, maintenant il est heureux, lui ; occupons-nous de nous. Parlez donc, Valentin : que faut-il faire ? Nous sommes prêts.

— Bien, dit Valentin ; il est temps que le courage nous revienne, car le plus rude de notre besogne n’est pas fait encore ; ce n’est rien d’avoir franchi cette barranca si l’on peut ici retrouver nos traces : voilà ce que je veux éviter.

— Hum, fit don Pablo, cela est bien difficile, pour ne pas dire impossible.

— Rien n’est impossible avec de la force, du courage et de l’adresse ; écoutez avec attention ce que je vais vous dire.

  1. Ce qui n’a pas de remède, mieux vaut l’oublier.