Page:Aimard - La Loi de Lynch, 1859.djvu/276

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puis, se tournant vers les trois hommes qui la regardaient avec anxiété et suivaient attentivement ses mouvements sans les comprendre :

— Voici de l’eau, dit-elle, buvez ! Je vous jure que si vous ne m’obéissez pas à l’instant, je perce avec le couteau l’outre dans laquelle il en reste encore ; alors tout sera perdu, et je souffrirai les mêmes douleurs que vous.

Ses compagnons ne répondirent pas ; ils se consultaient du regard.

— Pour la dernière fois, voulez-vous boire, oui ou non ? dit-elle en appuyant résolument son couteau sur l’outre.

— Arrêtez ! s’écria le moine en se levant précipitamment et en s’élançant vers elle. Demonios ! elle le ferait comme elle le dit.

Et, s’emparant du gobelet, il le vida d’un trait.

Ses compagnons l’imitèrent.

Cette gorgée d’eau, car les gobelets étaient d’un très-petite dimension, suffit cependant pour calmer l’irritation des trois hommes ; le feu qui les brûlait s’éteignit ; ils respirèrent plus facilement, et poussèrent un ah ! de satisfaction en se laissant retomber sur le sol.

Un sourire angélique éclaira le visage radieux de la jeune fille.

— Vous le voyez, reprit-elle, tout n’est pas perdu encore !

— Allons ! allons ! niña, répondit brusquement le moine, à quoi bon nous bercer d’un fol espoir ? Cette goutte d’eau que vous nous avez donnée ne peut qu’endormir pour quelques instants nos souffrances : dans une heure, notre soif reviendra plus ardente, plus aiguë, plus terrible que jamais.