Page:Aimard - La Loi de Lynch, 1859.djvu/72

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tre des ennemis en nombre même considérable. Il s’était promis d’utiliser ce lieu si quelque jour les circonstances l’obligeaient à chercher un abri formidable.

Sans perdre de temps les chasseurs s’étaient fortifiés. Dès que les retranchements avaient été terminés, Valentin était monté sur le sommet du tombeau du Bison-Fou et avait regardé avec attention dans la plaine.

On était alors à peu près à la moitié du jour. À la hauteur où se trouvait le Français, il découvrait une immense étendue de terrain.

La prairie et la rivière étaient désertes ; rien ne paraissait à l’horizon, si ce n’est çà et là quelques troupeaux de buffles et de bisons, les uns broutant l’herbe épaisse, les autres nonchalamment couchés.

Le chasseur éprouva un sentiment de joie indicible en croyant reconnaître que sa piste était perdue par les Apaches et qu’il avait le temps nécessaire afin de tout préparer pour une vigoureuse défense.

Il s’occupa d’abord de garnir son camp de vivres pour ne pas être pris par la famine, si, comme il le supposait, il allait bientôt être attaqué.

Ses compagnons et lui firent donc une grande chasse aux bisons ; à mesure qu’on les tuait, leur chair était coupée en lanières très-minces, que l’on étendait sur des cordes pour les sécher au soleil et faire ce que dans les pampas on nomme du chargué.

La cuisine fut établie dans une grotte naturelle qui se trouva dans l’intérieur des retranchements. Il fut ainsi facile de faire du feu sans crainte d’être découvert, car la fumée se perdait par un nombre infini de fissures qui la rendaient imperceptible.