ils arrivaient au gué, un arriero se préparait à passer de l’autre côté du fleuve avec sa recca de mules ; il s’offrit, avec cette générosité innée chez les Mexicains, à les conduire tous deux au Paso.
Les deux hommes acceptèrent avec empressement, montèrent chacun sur une mule, et une demi-heure plus tard ils se trouvèrent en sûreté dans le village.
Après avoir donné quelques réaux à l’arriero pour payer le service qu’il lui avait rendu, don Miguel reprit les harnais de son cheval et fit un pas pour s’éloigner.
L’inconnu l’arrêta :
— Nous nous séparons ici, caballero, dit-il d’une voix rude avec un accent anglais fortement prononcé ; mais avant de nous quitter, laissez-moi vous exprimer ma profonde reconnaissance pour la façon noble et généreuse dont vous m’avez sauvé la vie au péril de la vôtre.
— Monsieur, répondit simplement le Mexicain, je n’ai fait que mon devoir en vous sauvant : au désert, tous les hommes sont frères et se doivent protection ; ne me remerciez donc pas, je vous prie, pour une action bien simple : tout autre à ma place eût agi comme je l’ai fait.
— Peut-être, reprit l’inconnu ; pourtant soyez assez bon, je vous prie, pour me dire votre nom, afin que je sache à qui je dois la vie.
— Cela est inutile, fit don Miguel en souriant ; seulement, comme je vous crois étranger à ce pays, laissez-moi vous donner un conseil.
— Lequel, monsieur ?
— Celui de ne plus, dorénavant, vous attaquer aux peccaris ; ce sont des ennemis terribles que l’on ne