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LES FRANCS TIREURS

rents en apparence, mais surveillant activement les divers mouvements des Mexicains.

À portée et demie de canon, à peu près, on apercevait le brick à la corne duquel flottait orgueilleusement un large pavillon américain.

— Je m’en doutais, dit le commandant, c’est un corsaire ; il a arboré les couleurs américaines pour nous tromper, mais nous sommes sur nos gardes.

— Croyez vous donc que ce navire ne soit pas américain ? demanda don Serapio.

— Pas plus que nous, c’est un corsaire argentin ou brésilien.

— Cependant, sa construction parait bien être américaine.

— La construction ne prouve rien : nos navires, achetés à divers pays, n’ont rien qui les fasse reconnaître ; nous n’avons pas de chantiers.

— C’est juste, mais tenez, le voilà qui vient au vent, il va virer.

— En effet, ses voiles commencent à faseiller.

Les Mexicains se croyaient si bien à l’abri d’une attaque, que la plus grande partie de l’équipage avait quitté les postes de combat pour suivre la manœuvre du brick ; les matelots perchés dans les haubans ou penchés aux sabords, regardaient curieusement sans songer au danger qu’il pouvait y avoir à manquer ainsi à la discipline.

Cependant le brick virait, ainsi que l’avait dit don Serapio ; tout à coup, au moment où il terminait son abattée, une détonation, se fît entendre, un sifflement aigu traversa l’espace, et le mât de beaupré de la corvette, coupé par un boulet, tomba à la mer en entraînant dans sa chute le mât de misaine.