Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris.djvu/139

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— Plus que ma vie, mon père.

— Et c’est pour cette péronnelle…

— Mon père, Denisà est une honnête et chaste enfant.

— Cette fois, j’ai tort ; Denisà est tout ce que tu dis, et beaucoup plus encore ; aime-la donc, puisque tu y tiens ; mais quant à l’épouser.

— Mon père, ou je l’épouserai ou je resterai garçon, répondit froidement et nettement le jeune homme ; la nuit où je me suis battu contre Felitz Oyandi, j’étais à la veillée.

— Qu’allais-tu faire là ? dit-il en haussant les épaules.

— Rappelez vos souvenirs. C’était pendant cette soirée terrible où nous avons été assez heureux pour sauver madame la marquise de Garmandia ; vous-même m’avez engagé à me rendre à cette veillée où, m’avez-vous dit, ma présence était indispensable.

— J’ai eu là, sur ma foi, une excellente idée ! grommela le docteur en haussant les épaules ; ensuite, voyons ?

— Eh bien, mon père, il est arrivé que M. Felitz de Oyandi, après avoir pendant quelques instants causé en ricanant avec quelques-uns de ses amis, s’est approché de Denisà, assise à l’angle de la cheminée, et, de son air le plus insolent, l’a avertie que le feu ne lui semblant pas assez clair, il allait y mettre une bûche, ce qu’il a fait aussitôt.

— Et alors ?

— Alors, mon père, Denisà, sans même le regarder, a pris des pincettes, a retiré la bûche et l’a posée droite auprès du chambranle de la cheminée, où elle s’est éteinte presque tout de suite.

— Hum ! c’était un refus positif.

— Oui, père ; mais au lieu d’accepter sa déconvenue bravement, comme il le devait, il s’est retiré en grommelant des menaces et en ricanant ; alors, poussé par une force plus grande que ma volonté, ou, pour être franc, cédant à mon amour pour Denisà, je me suis élancé et j’ai recommencé l’expérience, le cœur palpitant,