— C’est vrai, dit Julian, lui serait-il arrivé quelque chose, mon Dieu !
— Pourquoi cette inquiétude ? Que veux-tu qui lui soit arrivé ?
— Felitz Oyandi est venu hier soir à Louberria, dit le jeune homme avec ressentiment.
— C’est vrai, s’écria Bernardo, je pars tout de suite.
— J’y vais moi-même ! s’écria Julian.
— Non, dit nettement Bernardo, pas d’imprudence, reste ici, je t’assure que je le l’amènerai.
— Mais cependant… s’écria le jeune homme.
— Il a raison, interrompit vivement le docteur ; il vaut mieux que Bernardo aille seul à Louberria ; je t’en prie, fils, reste près de moi.
— Je vous obéis, mon père, dit le jeune homme, en étouffant un soupir ; pars donc, mon Bernardo.
— Je serai bientôt de retour, s’écria le montagnard.
Et il s’élança au dehors.
Mais presque aussitôt il reparut, Denisà l’accompagnait.
La jeune fille était pâle, tremblante, défaite ; il y avait de l’égarement dans son regard.
Elle marchait d’un pas de statue.
Elle fit quelques pas dans la chambre sans rien voir, et tomba à demi évanouie sur un fauteuil en murmurant, d’une voix hachée, ces deux seuls mots :
— Me voici.
Mon Dieu ! s’écria Julia, pauvre chère Denisà, que lui est-il arrivé ?
Déjà le docteur faisait respirer des sels à la jeune fille.
Bientôt elle revint à elle et fondit en larmes.
Les trois hommes, en proie à la plus vive anxiété, regardaient la jeune fille sans oser lui adresser la parole, redoutant, s’ils l’interrogeaient, de redoubler sa douleur.
Mais bientôt, cette crise, à cause de sa violence même, commença à se calmer.
La jeune fille essuya ses larmes d’un geste fébrile, puis elle essaya de sourire et, tendant la main à son fiancé :