Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris.djvu/267

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Mais ces sinistres vestiges n’effraient personne.

Les nouveaux venus y reconnaissent une route et la suivent, avec cette philosophique indifférence qui caractérise les Américains.

Ces nouveaux venus tombent à leur tour, mais ils sont aussitôt remplacés par d’autres.

Et cela, toujours, sans cesse et aussi nombreux.

Le doigt de Dieu est là : on est contraint de s’incliner.

Les migrations barbares ont fait place aux missions civilisatrices.

Il faut se soumettre ou disparaître ; il n’y a pas de moyen terme.

Le nouveau monde doit se régénérer, disent les Américains du Nord, pour remplacer le vieux monde pourri, qui s’écroule de tous côtés.

Et ils croient à leur mission providentielle !

Deux mois, presque jour pour jour, s’étaient écoulés depuis les événements rapportés dans notre précédent chapitre.

Six heures du matin achevaient de sonner à la mystérieuse horloge de la nature.

Le soleil, surgissant soudain à l’horizon, comme le bouquet éblouissant d’un feu d’artifice grandiose, venait, de ses millions de gerbes d’or projetées dans toutes les directions, de dissiper les ténèbres, et comme un rideau qui se lève sur un décor splendide, d’illuminer instantanément, et sans transition aucune, le magnifique paysage dont nous avons, plus haut, essayé de crayonner quelques-uns des traits principaux.

Une solitude complète semblait régner sur la prairie.

D’épaisses masses de vapeurs, incessamment pompées par les rayons ardents du soleil, se balançaient en nuages capricieux au-dessus des cours d’eau, dont elles désignaient ainsi l’emplacement.

De nombreux vols de vautours, de gypaëtes et d’urubus, tournoyaient et se poursuivaient au plus haut des airs, avec des glapissements criards et discordants.

Dans les bois, les oiseaux de toutes sortes, frileuse-