— Venez près de moi, ici, tenez, vous serez comme dans un fauteuil.
— Là, m’y voici, eh bien !
— Je surveille l’ennemi.
— Comment, l’ennemi ? Que voulez-vous dire ?
— Regardez, monsieur le comte.
Le jeune homme se pencha dans la direction que lui indiquait le chasseur.
— Oh ! fit-il après un instant et vous ne prévenez pas nos hommes ?
— Il n’est pas encore temps ; rien ne presse. Que fait-on en bas ?
— Tout le monde dort, excepté les sentinelles.
— Et madame la comtesse ?
— Elle s’est étendue dans son hamac, en ordonnant qu’on la prévienne, et qu’on l’éveille à la première alerte.
— Oui, je le pensais. Votre mère est une sainte et vaillante femme, monsieur le comte ; c’est plaisir de la servir et de se battre pour elle.
— Merci, Charbonneau ; je suis heureux de vous entendre ainsi parler de ma mère.
— Je ne dis que la vérité, monsieur le comte ; mais pourquoi ne dormez-vous pas, vous aussi ? Vous devez avoir besoin de repos.
— Nullement, je me sens nerveux, je n’ai pas la moindre envie de dormir ; je suis inquiet, sans savoir pourquoi, j’ai besoin de me remuer pour tromper mon impatience.
— Oui, cela doit être ainsi ; vous êtes jeune, vous n’avez pas encore l’habitude. Quand vous aurez, comme moi, parcouru pendant dix ans le désert, vous n’y penserez plus : l’expérience vous aura appris la patience et le calme.
— C’est possible, ami Charbonneau ; mais en attendant, me voici près de vous. Que ferez-vous de moi ?
— Mon aide de camp, si vous voulez, monsieur le comte, répondit en riant le chasseur.
— C’est dit ; je ne demande pas mieux.