Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris.djvu/399

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chasseur canadien nommé Charbonneau, qui, je le sais de bonne source, a à se plaindre de la comtesse qu’il n’aime pas.

— Alors, c’est autre chose ; cependant prends garde de te laisser tromper.

— Non, ce n’est pas possible ; d’ailleurs ma pauvre petite était trop jeune pour s’échapper ainsi seule ; je n’en suis que trop certain, ma fille est morte.

— Que Dieu ait son âme, et dona Luz ?

— Je l’ai envoyée à Hermosillo dans sa famille ; c’est Sébastien que j’ai chargé de l’y conduire ; je l’attends d’un moment à l’autre ; il devrait déjà être de retour ; ce long retard m’inquiète.

— Bon ! que veux-tu qu’il soit arrivé à un taureau de cette espèce ?

— Je ne sais ; les routes ne sont pas sûres pour nous, depuis que les Français occupent le Mexique.

— Sébastien est rusé, il s’en tirera, je l’espère.

— Et moi aussi. La tempête se calme, il se fait tard, tu devrais prendre quelques instants de repos.

— Je n’ai nulle envie de dormir. Si le cordonazo est définitivement calmé dans deux heures, je partirai ; je retournerai à Tubac

— Tu ferais mieux d’attendre le jour, au moins tu verrais clair à te diriger.

— Il faut que je sois là-bas avant le lever du soleil.

— Pourquoi tant de presse ?

— Parce que tandis que tu te prépareras de ton côté, moi je me préparerai du mien.

— À ton aise. Un dernier verre d’eau-de-vie de Catalogne ; elle est bonne.

— Merci, je n’ai plus soif. D’ailleurs je préfère l’eau-de-vie de France.

— Tu n’as pas dégouté. À ta santé, dit-il en vidant son gobelet. Je te laisse à tes réflexions ; je vais essayer de dormir quelques heures ; demain j’ai fort à faire.

— Bonsoir. Quant à moi, si tu le permets, je resterai là.