Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/153

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pas sortis vivants de mon camp. Mais laissons ces niaiseries et passons à des choses plus sérieuses. Toi, Calaveras, que penses-tu de tout cela ?

— Je pense que nous sommes dans un guêpier, dont nous aurons fort à faire pour nous tirer sans y laisser pied ou aile, répondit cauteleusement Felitz Oyandi.

— Que supposes-tu donc ?

— Moi ! Je ne suppose pas, je suis certain.

— De quoi es-tu certain ? Voyons, explique-toi clairement une fois en ta vie si cela t’est possible.

— Ah ! voilà ! c’est que ni toi ni Navaja vous n’ajouterez foi à ce que je dirai, car cette certitude que je possède n’est, pour ainsi dire, dans mon esprit que par intuition, et qu’il me serait impossible de donner la moindre preuve à l’appui de ce que j’avancerai,

— Va toujours, quand tu te seras expliqué, nous verrons quelle croyance nous devons accorder à tes suppositions, car cela ne peut être autre chose ?

— C’est vrai ; mais ces suppositions sont pour moi la vérité : les coureurs des bois et les Comanches qui se sont présentés ce matin au camp ont fait alliance avec don Cristoval de Cardenas et le Cœur-Sombre. Ils ne sont venus ici que pour te chercher une querelle d’allemand, et avoir le droit de t’attaquer plus tard, par exemple, lorsque tu tenteras ta surprise contre l’hacienda, et te mettre ainsi entre deux feux.

— C’est bizarre ! dit Navaja, la même pensée m’était venue à moi aussi.

— Ah ! fit le Mayor.

— Oui, cette réunion si nombreuse de coureurs des bois sur un même point m’a semblé extraordinaire, eux qui presque toujours agissent isolément.

— Excepté à l’époque des grandes chasses d’automne, et, si je ne me trompe, nous sommes précisément à cette époque de l’année, dit le Mayor avec un sourire ironique ; d’ailleurs, ils ont eu soin de le constater eux-mêmes.

— C’est précisément cette constatation qui a éveillé mes