Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/159

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La nuit était noire et sans lune ; le ciel était couvert de nuages lourds et chargés d’électricité.

Pas une étoile ne montrait le bout de son nez, selon l’expression d’un vieux poète ; le vent soufflait par rafales, l’obscurité était profonde ; tout présageait un orage prochain.

Après sa sortie du camp, Navaja, dès qu’il avait été assez éloigné pour ne plus craindre d’être aperçu par les sentinelles, avait brusquement changé de direction.

Au lieu de suivre la rive droite du Rio-Gila, il avait traversé la rivière à gué, et obliquant légèrement sur la gauche, il avait tourné la tête de son cheval du côté des frontières mexicaines.

Malgré l’obscurité, il marchait rapidement ; son cheval était un mustang des prairies, excellente bête dont le pied était sûr et dans lequel il avait, avec raison, une entière confiance.

Il marchait ainsi déjà depuis plusieurs heures.

L’orage se rapprochait et ne tarderait pas à éclater.

L’aventurier ne se souciant que médiocrement de rester exposé dans la savane à la fureur des éléments, dont il connaissait par expérience la force irrésistible de destruction, essayait de percer les ténèbres presque opaques dont il était enveloppé.

Mais c’était en vain que son regard sondait l’obscurité, il lui était impossible de rien apercevoir qui pût lui présager un abri prochain.

Notre voyageur se dépitait et maugréait contre le sort qui semblait s’acharner après lui.

Navaja ne savait plus comment sortir de l’embarras dans lequel il se trouvait, la situation devenait a chaque instant plus critique pour lui, la pluie commençait à tomber en gouttes larges comme des piastres, des éclairs verdâtres l’aveuglaient, et les roulements du tonnerre grondaient avec une force de plus en plus grande.

L’aventurier s’avisa d’employer le moyen suprême de tous les voyageurs égarés, c’est-à-dire de se confier à