Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/160

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l’intelligence de son cheval, et au lieu de le diriger, de se laisser diriger par lui.

Il lui mit donc la bride sur le cou, en lui disant, comme si l’animal eût pu le comprendre :

— Ma foi, Negro mon ami, arrange-toi comme tu pourras ; moi j’y renonce, cherche toi-même ta route, ma bonne bête.

Le cheval qui, depuis plus d’une heure, ne marchait qu’avec une difficulté extrême et commençait même à buter assez souvent, sembla comprendre l’appel pressant de son maître.

Il releva fièrement la tête, s’ébroua, poussa un hennissement joyeux, et faisant un brusque crochet sur la droite, il partit au galop de chasse sans apparence de fatigue.

— Il paraît que Negro m’a compris et qu’il a autant de hâte que moi de trouver un abri ! murmura joyeusement l’aventurier ; laissons-le faire, nous verrons où il nous conduira.

Pendant cet aparté, le cheval continuait à détaler gaiement en s’émouchant les flancs de sa longue queue.

Cette course durait depuis environ une demi-heure, l’orage se déclarait définitivement, lorsque l’aventurier, dont le regard interrogeait anxieusement l’horizon, aperçut une lueur presque imperceptible encore, et brillant dans la nuit comme une étoile.

— Le diable m’emporte si ce n’est pas un feu ! murmura Navaja ; il y a un campement près d’ici… hum ! pourvu que Negro ne m’ait pas fourré dans quelque guêpier.

Il regarda plus attentivement.

— Définitivement c’est un feu, reprit-il ; cette fois il n’y a pas à s’y tromper, c’est singulier ; parfois ce feu disparaît pour reparaître un instant après. Qu’est-ce que cela signifie ? Bah ! nous verrons bien ! Que risquai-je ? Je suis armé, si l’on m’attaque, je me défendrai ; mais pourquoi diable cette lueur s’éclipse-t-elle ainsi ?

Depuis quelques minutes le cheval avait quitté la sa-