Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/194

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— Dansons ! dit la comtesse de Valenfleurs avec élan.

— Dansons ! répéta héroïquement Denizà, qui avait la mort dans le cœur ; dansons au son de la fusillade, comme les républicains de 1792 dansaient au bruit du canon, pour défier les ennemis de la République.

— Dansons ! dansons ! s’écrièrent toutes les dames, électrisées par ces chaleureuses paroles.

— Oui, dansons ! répétèrent les hommes, mais dansons les armes à la main.

— Dans cette pièce, vous en trouverez, dit alors le capitaine Petit, en paraissant dans la salle de bal le revolver à la main, et suivi de ses quinze matelots brandissant leurs haches d’abordage ; venez, suivez-moi !

— Allons ! allons ! crièrent les hommes en s’élançant à la suite du brave capitaine.

L’élan était donné.

L’enthousiasme était général.

Personne ne voulait rester en arrière.

Bientôt les hommes reparurent, armés jusqu’aux dents, et le fusil en bandoulière.

— Un galop ! un galop ! crièrent les invités avec des trépignements de joie.

Et les danseurs s’élancèrent, emportés par un galop furieux et tout prêts à combattre au son, non seulement de la musique, mais encore de la fusillade qui faisait rage du côté de la Rancheria et des feux roulants qui se succédaient sans interruption dans les profondeurs éloignées du parc.

Il y avait un véritable héroïsme à danser dans des circonstances aussi critiques.

Le capitaine Édouard Petit, auxquels s’étaient joints tous les invités, trop âgés pour danser, mais encore capables de se battre bravement, avait improvisé, en quelques minutes, un bataillon d’une centaine d’hommes résolus, dont il avait pris le commandement.

Il avait organisé la défense de la salle de bal en embusquant des tirailleurs dans tous les fourrés de la huerta