Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/266

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Mais tous sont également coquins et ont pour la plupart des antécédents judiciaires déplorables.

Ce qu’il y a de plus curieux, c’est qu’ils vivent côte à côte, mais sans se mêler et presque sans se voir, avec les nombreux ouvriers honnêtes et laborieux des fabriques du clos de Rome.

À l’époque où se passe notre histoire, et peut-être encore aujourd’hui, vers le milieu d’une des rues fangeuses dont nous avons parlé, à gauche, en entrant dans la cour de Rome par la rue des Gravilliers, se trouvait une maison haute et étroite, remontant évidemment au quatorzième siècle, construite moitié en bois moitié en clayonnages, dont, à chaque étage, les fenêtres, garnies d’épaisses persiennes, restaient constamment fermées.

On pénétrait dans cette maison d’aspect sordide, honteux et misérable, par une porte basse et cintrée, ouvrant sur un long corridor étroit, sombre, humide, aboutissant à une cour de quatre mètres carrés, dont le centre était occupé par un puits à haute margelle en pierre, garnie d’une armature en arcade de fer forgé d’un très beau travail, mais rongée et déjetée par la rouille et la vétusté.

Ce puits, d’une grande profondeur, descendait, disait-on, jusqu’à d’immenses souterrains.

Mais personne n’aurait osé l’affirmer ; depuis plus de quarante ans, ce puits était condamné et recouvert de planches épaisses, assujetties par une barre de fer garnie d’un énorme cadenas.

À droite de la porte de la rue, percée d’un judas, et qui ne se fermait jamais avant minuit, se trouvait une boutique, occupant toute la façade de la maison, c’est-à-dire environ huit mètres.

Cette boutique, extérieurement défendue par une forte grille en fer à barreaux très rapprochés, posée sur toute la façade, à hauteur des fenêtres, et peinte au minium, n’avait d’autre enseigne que des rideaux rouges, hermétiquement clos, et ne permettant pas au regard curieux des passants de pénétrer à l’intérieur.