Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/333

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me semblera aussi beau que vous, Armand, ni aussi noble, ni aussi généreux.

— Votre heure sonnera tôt ou tard, chère Vanda, vous aimerez ! Vous ne comprenez pas cela encore, chère enfant, parce que, chaste et pure jeune fille que vous êtes, vous n’avez pas encore senti les battements de votre cœur.

Par un mouvement irrésistible, la jeune fille posa sa main mignonne sur le bras du jeune homme, et, d’une douceur étrange :

— Armand, dit-elle, j’ai dans ce cœur, dont je n’ai pas encore senti les battements, gravée en traits de feu, depuis six ans, l’image du seul homme que j’aimerai jamais.

— Vanda ! s’écria le jeune homme éperdu, que voulez-vous dire ?

— Rien, si vous ne me comprenez pas ; sinon, que je suis bien malheureuse !

— Eh quoi ? il serait possible ! vous m’aimeriez ! s’écria-t-il au comble de la joie.

— Peut-être en ai-je trop dit !… Armand, mon frère, parlez à notre mère : quant à présent, je vous en prie, brisons-là et causons comme frère et sœur.

Et sans doute pour adoucir ce que cette réponse avait de trop sévère, elle ôta son gant de la main droite et la tendit au jeune homme, qui la couvrit de baisers brûlants.

— Assez, assez ! je vous en supplie, Armand, murmura-t-elle en retirant sa main, que le jeune homme essayait de retenir dans les siennes ; je souffre ! ajouta-t-elle en pâlissant légèrement.

Mais presque aussitôt ses fraîches couleurs reparurent, et elle fixa ses yeux pleins de douces langueurs sur le jeune homme avec une indicible tendresse.

Ils firent alors, comme d’un commun accord, tourner leurs chevaux.

— Où allons-nous, Armand ? demanda Vanda avec un gai et frais sourire.