Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/377

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— Comment me connaîtrait-il ?

— Je l’ignore, ce qui est certain, c’est que moi, il me connaît.

Le Mayor fit un bond sur le canapé.

— Il vous connaît ? s’écria-t-il en devenant livide.

— Oui, j’avais eu avec lui une longue conversation, pendant laquelle il m’avait traité d’une façon plus que blessante. Pendant toute notre entrevue, j’avais dissimulé ma colère, résolu à me venger de lui dès que l’occasion s’en présenterait ; grâce à certains moyens dont je dispose, j’avais réussi à savoir qu’il se nommait Montréal ou de Montréal, qu’il appartenait à une excellente famille du Nivernais, et qu’à la suite d’événements sur lesquels je ne pus obtenir aucun éclaircissement, il avait été contraint de se jeter dans le monde des voleurs, où il se cachait sous le pseudonyme de Loupeur. Bref, en le reconduisant, notre entretien terminé, jusqu’à la porte de la rue, et prenant congé de lui, je lui dis, afin de lui prouver que j’avais percé son incognito : — Bonsoir, monsieur de Montréal.

— Hum ! vous avez commis là une grave imprudence.

— C’est vrai, mais il était trop tard. Le drôle se mit à rire et me cria à pleine voix : — Bonsoir, monsieur Felitz Oyandi.

— Comme moi ! s’écria involontairement le Mayor ; ah ! ça, tout le monde nous connaît donc ?

— Hein ! que voulez-vous dire ?

— Rien ; vous le saurez bientôt, achevez ; comment se fait-il que vous ne l’avez pas tué raide ?

— Il était trop loin pour que je pusse l’atteindre ; d’ailleurs, je fus atterré de cette interpellation ; je restai pendant quelques instants sans avoir conscience de moi-même. Lorsque je revins à moi, il était entré chez un marchand de vins ; cependant je ne désespérai pas. Cinq minutes plus tard, il avait à ses trousses un de nos plus résolus bandits, auquel j’avais remis cent francs.

— Eh bien ?

— Je l’ai revu ce matin au rendez-vous qu’il m’avait