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LES RODEURS DE FRONTIÈRES

— Oui, c’est moi ! après, fit-il d’un ton bourru.

— Pardonnez-moi ! je ne vous connaissais encore que de réputation ; pardieu ! je suis charmé de vous avoir vu.

— Eh bien ! maintenant que vous me connaissez, êtes-vous disposé à répondre à mes questions ?

— Il faut savoir de quelle sorte elles sont ; voyons-les donc d’abord.

— Qu’est devenu mon esclave ?

— De qui parlez-vous ? Est-ce de l’homme qui s’est, il n’y a qu’un instant, jeté à l’eau de la plate-forme sur laquelle vous vous trouvez en ce moment ?

— Oui ; où est-il ?

— Ici, à côté de moi.

En effet, le nègre, à bout de force et de courage, après la lutte désespérée qu’il avait soutenue pendant la poursuite acharnée dont il avait été l’objet s’était traîné jusqu’à l’endroit où se trouvait le Canadien, et s’était laissé tomber à moitié évanoui presque à ses pieds.

En entendant le chasseur dénoncer aussi catégoriquement sa présence, il joignit les mains avec effort et levant vers lui son visage inondé de larmes :

— Oh ! maître ! maître ! s’écria-t-il avec une expression d’angoisse impossible à rendre, sauvez-moi ! sauvez-moi !

— Ah ! ah ! s’écria en ricanant John Davis, je crois que nous pourrons nous entendre, mon gaillard, et que vous ne serez pas fâché de gagner la prime.

— Au fait je ne serais pas fâché de savoir à combien est taxée la chair humaine dans votre soi-disant pays de liberté. Est-elle forte cette prime ?

— Vingt dollars pour un nègre marron.