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Page:Aimard - Les Rôdeurs de frontières, 1910.djvu/252

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LES RODEURS DE FRONTIÈRES

Ces paroles furent prononcées par la jeune fille avec une franchise tellement naïve, que pendant quelques instants le Canadien demeura complétement abasourdi ; la faible lueur qu’il avait cru saisir lui échappait tout à coup sans qu’il lui fût possible de s’expliquer comment elle avait disparu ; il ne comprenait plus rien à la conduite de doña Carmela, ni aux motifs qui la faisaient agir, d’autant plus qu’il n’avait aucune raison de se méfier de sa bonne foi dans tout ce qu’elle lui avait dit.

Après avoir considéré attentivement la jeune fille pendant quelques instants, il secoua deux ou trois fois la tête en homme complétement fourvoyé, et sans ajouter une parole, il se mit en devoir de réveiller ses compagnons.

Tranquille était un des plus expérimentés coureurs des bois du nord-Amérique, tous les secrets du désert lui étaient connus, mais il ignorait le premier mot de ce grand mystère qui s’appelle le cœur des femmes, mystère d’autant plus difficile à pénétrer, que les femmes elles-mêmes s’ignorent presque toujours, car elles n’agissent le plus souvent que sous l’impression du moment, sous le coup de la passion et sans arrière-pensée.

En quelques mots, le Canadien mit ses compagnons au fait de son projet ; ceux-ci, comme il s’y attendait, ne firent pas la moindre objection, mais ils se préparèrent à le suivre.

Dix minutes plus tard ils montaient à cheval, et quittaient leur campement à la suite de Lanzi qui leur servait de guide.

Au moment où ils disparaissaient sous le couvert,