l’Élan-Noir était occupé philosophiquement à tendre ses pièges aux castors, ces intéressants animaux que doña Luz aimait tant.
Ils marchaient ainsi depuis une heure à peu près, en causant et riant entre eux, car les raisonnements de Belhumeur avaient fini par convaincre le Cœur-Loyal qui, connaissant à fond les mœurs indiennes, était persuadé que sa mère ne courait aucun danger, lorsque les limiers donnèrent tout à coup des signes d’inquiétude et s’élancèrent en avant en poussant des sourds jappements de joie.
— Qu’ont donc nos rastreros ? dit le Cœur-Loyal, on croirait qu’ils ont senti un ami.
— Pardieu ! ils ont éventé l’Élan-Noir, probablement nous allons les voir revenir ensemble.
— C’est possible, dit le chasseur pensif, et ils continuèrent à avancer.
Au bout de quelques instants ils aperçurent un cavalier qui accourait vers eux à fond de train, entouré des chiens qui sautaient après lui en aboyant.
— Ce n’est pas l’Élan-Noir, s’écria Belhumeur.
— Non, fit le Cœur-Loyal, c’est nô Eusébio ; que signifie cela ? il est seul, serait-il arrivé malheur à ma mère ?
— Piquons ! dit Belhumeur en enfonçant les éperons dans le ventre de son cheval qui partit avec une vélocité incroyable.
Le chasseur le suivit en proie à une inquiétude mortelle.