— Mais, en attendant ?…
— En attendant, indiquez-moi, de grâce, le moyen de sortir de cette maison sans être remarquée.
— Rien de plus facile.
— Dites.
— Le propriétaire de cet hôtel…
— Pardon, vous m’aviez raconté de prime abord que nous étions dans une maison des plus bourgeoises.
Le débardeur lilas se mordit les lèvres et il reprit avec vivacité :
— Oh ! mon Dieu ! hôtel, maison, c’est tout un.
— Maison garnie, alors ? fit ironiquement la comtesse de Casa-Real.
— Non, madame, non. Le propriétaire de cet immeuble, si mieux vous aimez, en habite le premier étage.
— Il donne un bal ?
— Masqué.
— De sorte qu’en me glissant dans ses salons…
— Personne ne fera attention à vous.
— Merci bien.
— Si vous mettez un loup, bien entendu. En avez-vous ?
— J’en ai deux dans ma poche, un blanc et un noir.
— Voyez donc, comtesse, vous êtes deux fois plus dissimulée que nous, qui en portons un seulement.
— Oui, mais moi, j’ôte les miens.
— On n’est pas femme, et jolie femme, pour rien.
— Des compliments ! Ce n’est pas lui ! murmura-t-elle. Cette maison, cet hôtel, cet immeuble, comme vous l’appelez, appartient à… ?
— À quelqu’un.
— Je m’en doute.
— Que je ne connais pas.
— Un indigène ? demanda le pierrot en riant.
— Un Français ? Non, madame. Un riche étranger, un Espagnol, je crois.
— Un Espagnol. Vous me le présenterez… un compatriote…
— Vous oubliez, comtesse, que vous passerez incognito…
— C’est vrai.
— D’ailleurs, n’ayez pas de regrets. Je ne lui ai jamais été présenté moi-même.
— Ainsi, nous nous trouvons chez ce descendant de Pélage ?…
— À son insu.
— Et vous ne le connaissez pas ?
— Ni d’Eve ni d’Adam.
— Allons ! c’est à merveille.
Elle se leva, certaine qu’elle n’en apprendrait pas davantage, ses ennemis ou ses protecteurs jouant toujours aussi serré.
Les masques se levèrent comme elle.
— Faut-il vous servir de guide ? demanda le débardeur lilas.
— Non, je trouverai l’antichambre toute seule.