Page:Aimard - Les invisibles de Paris, 1893.djvu/746

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— Comment cela ?

— À travers sa fenêtre. Le tapage l’a fait approcher. Il a regardé. Il doit m’avoir reconnu.

— Et puis ? demanda vivement le vicomte.

— Et puis, on lui aura enjoint de ne pas rester au carreau… car je lui ai vu faire un geste de mauvaise humeur… et il a disparu de la fenêtre.

— Où l’a-t-on placé ?

— Dans une espèce de pavillon qui se trouve juste au milieu de la cour.

— Un pavillon sans communications avec l’extérieur ?

— C’est ça. Le rez-de-chaussée en est occupé par des étables.

— Diable ! fit le vicomte d’un air soucieux.

— Oui… c’est dur… mais ce n’est pas tout.

— Quoi encore ?

— Le pavillon a quatre fenêtres et une porte à deux battants.

— Eh bien ! qu’importe ?

— Au bas de chaque fenêtre, il y a un factionnaire.

— Et devant la porte ?

— Deux. En tout, six.

— Qu’ils en mettent vingt s’ils le veulent…

— C’est ce que j’ai pensé, dit Mouchette avec philosophie… À la grande rigueur, je trouve qu’ils n’en ont pas mis assez. Maintenant, il faut vous dire…

— Autre chose ?

— Sans doute. Sous une espèce de hangar, sans portes, ni volets, qui sert à remiser des charrettes, il y a un grand réservoir avec une cuve en pierre devant.

— Va… va…

— Va… va… vous avez l’air de cracher sur mon réservoir et sur ma cuve… vous avez tort.

— De quelle utilité peuvent-ils nous être ?

— Attendez, vous verrez… dit sentencieusement le gamin… Au bas de la cuve coule un ruisselet.

— Ah ?

— Ce ruisselet, au lieu de serpenter dans la cour, fait un coude, et par un trou percé dans le mur, au pied du hangar, il lâche son eau dans la campagne.

— Bon ! s’écria le vicomte, qui entrevoyait où allait en arriver l’enfant.

— Cette partie du hangar se trouve tellement encombrée d’ustensiles de travail qu’il devient presque impossible de le voir en plein jour… si bien que la nuit il n’y a pas de danger qu’on y fourre le nez.

— Bravo !

— J’ai voulu en avoir le cœur net.

— Qu’as-tu fait ?

— J’ai fait… d’abord le tour de la ferme… Puis, après avoir renclosé le cheval, je suis revenu au pied du mur en question.

— Tu as retrouvé le trou ?

— Il le fallait bien, répliqua Mouchette avec modestie, sans ça, ce que je vous raconte ou rien ce serait la même chansonnette ; en dehors, à cet