Page:Aimard - Les rois de l'océan, 1 (L'Olonnais).djvu/112

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la Compagnie ; tout en causant avec cet agent sur le port, en attendant son canot pour retourner à bord, il suivait d’un regard distrait les évolutions d’une pirogue manœuvrée par un seul homme, et qui exécutait les courbes les plus gracieuses ; lorsque cette pirogue virant subitement de bord, se dirigea rapidement vers la terre, et vint s’échouer à deux pas de l’endroit, où se tenait le capitaine.

Le marin qui la montait sauta légèrement à terre et après avoir tiré sa pirogue sur le sable, il s’approcha du capitaine, le bonnet à la main.

Ce marin était un jeune homme de vingt-six ans ; d’une taille élevée, bien prise, parfaitement proportionnée ; et doué ainsi qu’il en avait donné la preuve quelques minutes auparavant, d’une agilité, d’une force et d’une adresse extraordinaires : ses traits mâles et accentués avaient une rare expression d’énergie et de franchise ; il avait les yeux noirs, le regard profond, le front large et pur, le nez droit, la bouche un peu grande garnie de dents magnifiques. Ses longs cheveux blonds et soyeux, sa fine moustache un peu fauve coquettement retroussée, imprimaient à sa physionomie un cachet d’étrangeté, qui inspirait la sympathie au premier abord ; en somme, c’était un beau et vigoureux garçon ressemblant bien plutôt à un gentilhomme déguisé, qu’à un matelot ; et cependant il en portait le costume avec une aisance témoignant d’une longue habitude.

— Voilà un beau gars ! dit à voix basse le capitaine à l’agent de la Compagnie, pendant que le matelot s’approchait.

— Et fièrement campé ! répondit l’agent sur le même ton.

En ce moment le matelot les aborda :

— Je vous demande pardon, messieurs, d’interrompre votre conversation ; dit-il poliment d’une voix sonore et harmonieusement timbrée.

— Que désirez-vous, mon ami ? demanda le capitaine. Cherchez-vous un engagement ?