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Page:Aimard - Les rois de l'océan, 1 (L'Olonnais).djvu/170

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d’or et de pierreries, les feutres empanachés, dont la forme était entourée d’une lourde fanfaronne ; les épaules chargées de colliers en diamants, allaient d’un pas fier, fumant une pipe microscopique, suivis de valets couverts de livrées éblouissantes et portant leurs longues rapières ; les autres, vêtus de haillons sordides, car on allait d’un extrême à l’autre, et pour ainsi dire drapés dans des ficelles, marchaient d’un pas non moins fier et imposant ; et parfois causaient sur le pied de la plus complète égalité avec les boucaniers si richement vêtus et qui, peut-être le lendemain, maltraités par le jeu, seraient eux aussi réduits à porter de problématiques guenilles ; puis c’étaient des cavaliers montés sur des chevaux à demi-sauvages, piétinant et caracolant avec fracas au milieu de la foule ; de ravissantes créoles languissamment couchées dans des palanquins portés sur les épaules des esclaves à demi-nus, brûlés par le soleil et semblables à des squelettes, tant leur maigreur était affreuse. Ces malheureux étaient des Espagnols pris sur les bâtiments de leur nation ou enlevés en terre ferme dans une expédition.

Puis des engagés faméliques, aux regards craintifs et sournois, suivis par trois ou quatre de ces énormes venteurs, espèce de chiens féroces dont se servaient les boucaniers pour la chasse aux taureaux sauvages ; des marchands ambulants ; enfin une multitude composée capricieusement d’individus de toutes sortes, de toutes classes et de toutes couleurs.

— C’est égal, s’écria tout à coup Pitrians avec conviction, je ne me repens pas de mon voyage ! On a bien raison de dire que la Côte est un singulier pays !

— Oui, répondit nonchalamment l’Olonnais, bien singulier pays, en effet !

— Et dans lequel nous sommes arrivés d’une façon peu ordinaire.

— C’est vrai ! Pauvre capitaine Guichard !

— Ah ! à quoi bon nous attrister ! La vie est courte, hâtons-nous d’en jouir ! Pourquoi diable avons-nous