cieusement Pitrians, en posant son fusil dans un coin de la salle.
Des engagés apportèrent les plats, et le repas commença.
Vent-en-Panne avait cinq engagés, mais contrairement à l’usage adopté par un grand nombre de frères de la Côte, il les traitait avec une extrême douceur. Aussi en était-il adoré. Ils se seraient mis au feu pour lui.
Ces engagés avaient bonne mine, ils étaient bien vêtus ; on reconnaissait au premier coup d’œil, qu’ils se trouvaient heureux, et attendaient avec assez de patience le jour de leur libération.
Ces cinq hommes étaient Tributor, ce géant débonnaire, que déjà nous avons entrevu à bord du Santiago gardant le comte Horace ; Olivier Œxmelin, élève en chirurgie, embarqué par surprise pour la côte et vendu comme engagé ; c’est lui qui plus tard a écrit cette histoire des boucaniers si palpitante d’intérêt, et dans laquelle il nous fait si bien connaître ces hommes extraordinaires, que tous il a vus et avec lesquels il a vécu près de vingt ans ; Barbe-Noire, un Dieppois à la mine efféminée, nerveux et coquet comme une jeune fille, quoique taillé en Hercule ; parlant avec une voix douce et un accent prétentieux, mais en somme un brave cœur et doué d’un courage de lion ; puis venait Six-Deniers, petit homme sec, nerveux, à la mine chafouine, à la physionomie railleuse et grimaçante ; rusé comme un procureur, voleur comme une pie et dont le courage laissait un peu trop à désirer ; cependant il possédait le talent de se tirer des situations les plus difficiles sans y perdre une seule de ses plumes. Ce groupe remarquable était complété par Mouffetard, grand escogriffe né à Paris ainsi que l’indiquait son nom de famille ; il ne s’en était jamais connu ; il avait poussé comme une plante parasite sur le pavé parisien, sans souci de l’avenir ; son existence jusqu’à l’heure où les racoleurs de la Compagnie des Indes l’avaient em-