grande affaire, je vous engage à aller voir cela. Et maintenant, messieurs, vous décidez-vous à vous décider ? dit-il d’une voix railleuse ; il serait temps d’en finir.
— Soit, monsieur, finissons-en donc ; répondit nettement le Chat-Tigre ; pour des raisons qui nous sont personnelles, nous voulons nous emparer d’un frère de la Côte, connu parmi vous sous le nom de Vent-en-Panne.
— Je le savais.
— Vous ? Comment ?
— Eh mon Dieu ! comme je sais tout ; voilà pourquoi j’avais sollicité une invitation au dîner donné aujourd’hui par le duc de la Torre. Vent-en-Panne devait assister à ce dîner ; j’étais résolu à lui chercher querelle, mais il a sans doute été prévenu et s’est abstenu de paraître. C’est une affaire manquée, il nous faudra employer un autre moyen ; je n’ai réussi qu’à ramasser un duel avec un jeune coq, nommé l’Olonnais, qui me paraît assez solide sur ses ergots, mais que dans quelques heures j’espère mettre à la raison ; continuez.
— Ce Vent-en-Panne, reprit le Chat-Tigre, est notre ennemi mortel, implacable ; nous ne reculerons devant rien pour le tenir entre nos mains.
— Comme lui vous a tenus entre les siennes, n’est-ce pas ? fit le boucanier en ricanant.
— Eh bien oui ! s’écria le Chat-Tigre avec rage, puisque vous semblez si bien instruit de ces choses que nous croyions secrètes, c’est ainsi, nous voulons venger une injure horrible par une plus effroyable encore. Voilà pourquoi nous réclamons votre concours ; quel que soit le prix que vous exigiez de nous, il vous sera intégralement payé le jour où vous nous livrerez notre ennemi pieds et poings liés.
— Ce que vous me demandez est impossible, répondit Bothwell en hochant la tête.
— Comment, impossible !
— Oui. Vent-en-Panne est un redoutable lutteur ; je lui ai vu accomplir des faits d’une audace incroyable.