— Cela ne saurait être, monsieur ! s’écria vivement le duc. Ces hommes sont des brigands hors la loi, ils ne sont pas plus mes compatriotes que les vôtres ; je manquerais à mon devoir, en ne combattant pas à vos côtés ; je vous prie donc, tout en vous remerciant sincèrement, de ne pas insister sur ce sujet, ma résolution est prise, elle est irrévocable.
— Soit, M. le duc, nul mieux que vous ne connaît les questions d’honneur.
Et se tournant vers ses compagnons, Montbarts ajouta :
— Frères ! ces hommes ne sont que deux cent cinquante au plus, il nous faut donc abattre chacun six ennemis ; ce n’est rien pour nous !
— Pardieu ! Vive Montbarts ! crièrent les flibustiers.
— Maintenant, reprit Montbarts, agissons et vivement, nous n’avons perdu que trop de temps déjà ; et d’abord par de fausse pitié ; égorgez les chevaux, leurs cadavres nous serviront de retranchement ; cet abri-là en vaut bien un autre !
La situation était critique, presque désespérée ; tous les frères de la Côte le savaient. Ils étaient tous trop véritablement braves, pour ne pas envisager leur position telle qu’elle était réellement ; l’ordre cruel de leur chef fut exécuté sans hésitation ; les malheureux chevaux, égorgés par les engagés, furent amoncelés et formèrent bientôt, avec leurs cadavres pantelants, un abri derrière lequel les flibustiers s’agenouillèrent, et ouvrirent un feu d’autant plus terrible contre leurs ennemis, que, grâce à leur adresse extraordinaire, chaque coup abattait un homme.
Cette fusillade causa, en quelques minutes, des pertes si sérieuses aux assaillants qu’elle calma leur ardeur première ; et les contraignit à se réfugier derrière les arbres ; de façon à diriger leurs attaques avec plus de prudence, et éviter ainsi d’être décimés par ces indomptables ennemis ; qui, malgré leur petit nombre, sem-