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I

COMMENT UN FANTÔME APPARUT À L’ÉQUIPAGE DE LA PIROGUE ESPAGNOLE LE SAN JUAN DE DIOS ET CE QUI EN ADVINT.

C’était le 15 juillet 1674. Il était deux heures du matin.

La mer était grosse et moutonneuse comme à la suite d’un ouragan. La lune très-brillante dans un ciel équatorial diamanté d’étoiles scintillantes, disparaissait parfois sous quelques nuages chassés en fugue par le vent du Sud-Est, mais ne tardait pas à argenter de nouveau le sommet des lames frangées d’écume et à se mirer aux larges surfaces de la houle.

Une pirogue de guerre espagnole filait silencieuse et sombre le long de la côte de l’île de Cuba, dont elle ne s’éloignait qu’à la distance de deux encâblures au plus, afin de se dissimuler sous l’ombre protectrice projetée au loin par les hautes montagnes de l’île.

Nous décrirons en quelques mots ce léger bâtiment dont le type est aujourd’hui perdu mais qui, à l’époque dont nous parlons, était fort employé dans les Antilles et rendait de grands services pour les voyages se rapportant surtout au cabotage.

Cette pirogue, longue de quatre-vingt-dix pieds de roi et large de dix-huit, s’effilait beaucoup sur l’avant, mais conservait une largeur moyenne de six pieds à l’arrière.