Page:Aimard - Les rois de l'océan, 2 (Vent-en-panne).djvu/256

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— Oui ; répondit-il avec chaleur.

— Pourquoi donc, s’il en est ainsi, n’as-tu pas défendu ton ami ? pourquoi l’as-tu laissé prendre par les Gavachos ?

— Tu me fais injure, Fleur-de-Mai ; je n’ai pas abandonné mon ami ; j’ai combattu bravement pour le défendre ; si je ne l’ai pas sauvé, c’est que lui-même m’a ordonné de partir.

— Oui, fit-elle en hochant la tête d’un air de doute ; on dit cela, mais celui qui le dit ne le croit pas lui-même ! Pitrians, tu t’es mal conduit ; tu ne devais pas abandonner ton frère.

— Peut-être as-tu raison en effet ; dit le flibustier d’une voix sourde, je me suis souvent reproché de lui avoir obéi.

— Veux-tu réparer ta faute, Pitrians ? reprit la jeune fille avec un sourire enfantin, plein de ce charme dont elle possédait si bien le secret.

— Certes, je le veux, répondit-il vivement ; que faut-il faire pour cela, Fleur-de-Mai ?

— Il faut me donner les moyens de m’introduire dans la ville, cette nuit même.

— Tu es folle, enfant ! s’écria le jeune homme en faisant malgré lui un bond de surprise ; les gavachos te tueront !

La jeune fille secoua la tête.

— Non, répondit-elle avec une angélique douceur ; pourquoi me feraient-ils du mal, puisque je ne veux pas leur en faire ?

— Mais enfin, quel est ton projet, Fleur-de-Mai ?

— À quoi bon te le dire ? tu ne le comprendrais pas. Veux-tu faire ce que je te demande ?

— Mais c’est impossible, enfant que tu es !

— Pourquoi te sers-tu de ce mot ? nos frères ne l’emploient jamais, ils prétendent qu’il n’est bon que pour les lâches.

— Écoute-moi, Fleur-de-Mai, je t’en supplie.

— C’est inutile, puisque tu ne veux pas me servir ;