Page:Aimard - Ourson-tête-de-fer.djvu/197

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passion du jeu, tous les soirs on joue dans sa maison ; et souvent des sommes considérables sont engagées soit aux dés, soit au monte.

— Le jeu est le fléau de l’Amérique, querida ! c’est par le jeu que périront les colonies espagnoles.

— Et les familles des colons. Il y a un mois environ, mon père arriva ici a l’improviste, il me fit appeler et s’enferma avec moi dans ce même salon où nous sommes en ce moment. Il me fit asseoir auprès de lui, me regarda attentivement pendant quelques minutes, puis prenant la parole d’une voix dure, il me dit : « Elmina, vous êtes belle, vous avez dix-huit ans, le moment est venu de vous marier. J’ai fait choix d’un époux pour vous ; cet époux est un caballero fort riche, mon ami le plus intime, préparez-vous donc à le recevoir et à lui faire bon visage ; je lui ai donné ma parole, et vous savez que jamais je ne reviens sur une résolution prise, et surtout sur une parole donnée. Vous avez deux mois pour vous préparer à cette union ; dans deux mois, jour pour jour, à compter de ce moment, Monseigneur l’évêque de Cartagena bénira votre mariage dans l’église de la Merci. L’homme avec lequel vous êtes dès à présent fiancée, Elmina, est don Enrique Torribio Moreno. » Ce fut tout.

— Et que répondis-tu à cette communication de ton père ?

— Rien. Et puis qu’aurais-je pu répondre à une volonté si péremptoirement formulée ? J’étais at-